Manuel Valls, assumez votre voilophobie

 

Mécontent de la décision rendue sur le burkini par la plus haute autorité judiciaire d’un pays dont il prétend défendre les valeurs et la loi, notre premier ministre n’a pu s’empêcher de nous composer un petit texte mettant en lumière, une fois de plus, ses convictions personnelles. Analysons sommairement quelques morceaux choisis.

D’emblée, l’étalon espagnol éternellement lié à Israël annonce la couleur :

 »(…) cette ordonnance du Conseil d’Etat n’épuise pas le débat qui s’est ouvert dans notre société sur la question du burkini. Ce débat n’est pas anodin. C’est un débat de fond, qui vient après d’autres : il y a trente ans, la question du foulard dans les écoles, puis la loi de 2004 sur le port de signes religieux, et celle de 2010 sur le voile intégral dans l’espace public. »

Musulmans pratiquants, visibles, concernés et ciblés par les incessants débats politico-médiatiques actuels n’ont eu de cesse de le comprendre et d’en alerter les français de tous bords. Le burkini gate n’a pas été simple affaire de vêtement. Il y a l’affaire, et ce que cache l’affaire. De nombreux musulmans encore aujourd’hui semblent toujours n’avoir rien compris. S’arrêtant sur le simple caractère licite ou non du vêtement – islamiquement parlant – ils furent beaucoup à aller jusqu’à se satisfaire des arrêtés pris par certains maires… Le burkini n’ayant rien à voir avec l’islam, la polémique ne les auraient donc pas concernés… L’adage n’est pas faux, montrer la lune à l’idiot, il regardera votre doigt. Voilà de quoi réjouir les fondamentalistes laïques les plus enjoués! Les principaux burkinivores ont pourtant été très clairs quant à leurs intentions. Il s’agit bien à travers ce refus du burkini, de prévenir et tuer dans l’oeuf ce qu’ils pensent être l’affirmation d’un islam politique et fascisant. Il aurait été question de cape en plastique ou de bottes violettes, le débat aurait été semblable. C’est l’identité musulmane, et plus particulièrement la visibilité de la femme musulmane qui a été là, pour la énième fois, source d’autant d’hystérie. Manuel Valls est ainsi en totale cohérence avec l’ensemble de son entreprise, le débat sur le burkini, et il le dit clairement, s’inscrit bien dans une extension constante et désirée de la loi de 2004 sur le voile. Faut-il que ce soit plus clair pour que tu comprenne akhi?

 »dénoncer cette tenue, est-ce stigmatiser les musulmans, ou bien est-ce justement le port de signes prosélytes de cette nature qui est un risque pour tous les musulmans de France, alors assimilés à l’islamisme politique militant ? »

Est-il en train de nous faire comprendre que porter ce genre de vêtement est un risque pour la musulmane, car cela l’amènerait de ce fait à se voir assimilé à l’islamisme politique militant? Nous nageons en plein délire. Le même qui depuis deux ans nourrit les amalgames et martèle dans la tête des français que le voile est le symbole de ce dit islamisme, nous explique que porter ce même voile risque d’amener les musulmans à se voir assimilés à ce à quoi il les a jusqu’ici , lui-même, associé. Comme le disait Yann Moix face à une NKM délirante chez Laurent Ruquier, éviter les polémiques en interdisant telle expression vestimentaire, revient à vouloir lutter contre le rhume en interdisant le vent.

 »dénoncer le burkini, ce n’est en aucun cas mettre en cause une liberté individuelle. Il n’y a pas de liberté qui enferme les femmes ! C’est dénoncer un islamisme mortifère, rétrograde. Une vision que je n’accepte pas au nom même de la place que l’Islam doit trouver dans notre société. »

Dans la droite lignée des vilains islamistes misogynes qu’il dénonce, notre premier ministre s’accorde le droit de décider ce qui serait bon pour la femme ou non. Tel vêtement l’enferme, tel autre la libère. Mais attention, si décider ce qui est bon pour les femmes au nom de la religion est mal, le faire au nom de la laïcité et du féminisme (!!), c’est bien. Pour le côté rétrograde de la chose, c’est un jugement de valeurs, il a le droit de l’avoir, mais non de l’imposer aux autres. Nous retiendrons néanmoins la sommation sous-jacente faite en cette place que doit trouver l’islam dans notre société. Place qui est celle que Mr aura décidé pour vous, ignares et rétrogrades mahométans incivilisés.

 »Il y a, d’une part, cet islamisme politique, qui instrumentalise une religion, qui est le fait d’une minorité. Le burkini n’est pas un signe religieux, c’est l’affirmation dans l’espace public d’un islamisme politique. »

Le burkini n’est effectivement pas un signe religieux, c’est un maillot de bain, plus couvrant que d’autres, destiné à une clientèle spécifique, comme le serait un maillot une pièce, une tenue de surf ou un bikini. Mais un maillot de bain porté par des musulmanes, ça ne peut apparemment qu’être une affirmation volontaire et ostentatoire d’afficher son affiliation islamiste et politisante. Tout vêtement, tout acte islamiquement connoté est de toute façon à chaque fois décrit comme une volonté d’imposer ou d’afficher sa religion aux gens. Oui, ça aussi, ils en ont décidé ainsi. Un(e) musulman(e) ne peut pas porter quelque chose sans avoir sa petite idée derrière la tête.. Ca pourrait être drôle si ce n’était pas répété bêtement par de milliers de nos concitoyens, incapables de définir d’ailleurs ce qu’est l’islamisme, ou l’islam politique. Mais si le premier ministre et quelques autres faiseurs d’opinion le disent…

 »Il y a, d’autre part, la très grande majorité des musulmans, qui savent bien que le burkini est l’alliance improbable entre le mot bikini et le mot burqa – un mot qui dit bien ce qu’il veut dire ! »

Ou comment la fondatrice de ce vêtement, australienne de surcroit, doit bien rigoler dans son coin. Bien entendu que l’association est voulue, pourquoi ? Car ça interpelle. Pourquoi interpeller ? Parce qu’il s’agit ni plus ni moins de notions de base en marketing. Et pour entrer dans le monde redoutable du marché, il faut savoir se faire doué en marketing. Et cette madame semble avoir tout compris, Manuel Valls, pourtant très favorable au libéralisme économique, et donc à la liberté d’entreprise, pas encore. Dommage.

 »Le combat est juridique, chaque fois qu’un risque de trouble à l’ordre public sera établi. Mais le combat est d’abord, et avant tout, politique, au sens le plus profond du mot, culturel, pour dire ce que nous n’acceptons pas, car cela met en danger la cohésion de la Nation. »

Nous y venons. Dire ce que nous n’acceptons pas. Ce nous est déjà révélateur. Toi, la voilée, porteuse de burkini ou non, sache que tu n’en fait déjà pas partie. Mais en dehors de ce nous sentant bon le racisme, la condescendance et l’exclusion, nous ne pouvons que saluer cette volonté affichée de vouloir clarifier la chose. De nombreux musulmans sont effectivement las d’entendre ces sempiternels rappels à la loi, qui pourtant ne prévoient aucune interdiction de manifester sa religion en public. Tout comme ils sont las de se voir sommés de respecter les valeurs de la République, qu’ils ne font que respecter comme tout à chacun. Ainsi, si les lois, encore favorables à l’expression religieuse, ne conviennent plus aux individus identitairement crispés, révisons dans ce cas la Constitution, retirons-nous des signataires de la déclaration des droits de l’homme et bridons les libertés individuelles. Du côté des valeurs, si là aussi, liberté, égalité et fraternité semblent trop larges et pernicieuses pour ces sarrasins désormais français de sol, abolissons cette trinité républicaine et rétablissons un dogme d’Etat, décidant de ce que le français, et surtout le musulman, devra porter, dire et penser. Effectivement, si la Nation semble autant en danger à cause d’un morceau de tissu et de quelques imams n’aimant pas la musique et ne serrant pas la main aux femmes, nous comprendrons amplement…

 »Mais rester silencieux, comme par le passé, c’est un petit renoncement. Une démission de plus. Petit à petit, c’est alors notre pacte républicain qui se fissure sous le poids des communautarismes et des réflexes xénophobes qu’ils engendrent. »

Ainsi le communautarisme engendrerait des réflexes xénophobes. Encore une association dangereuse et mensongère. Se retrouver avec les siens et partager un destin commun avec des individus plutôt qu’avec d’autres n’amène en rien un quelconque culte de la xénophobie. C’est le refus de voir l’autre exister tel qu’il le désirerait qui engendre ce type de reflexes. Et ce que vous faites à plein temps Mr Valls, en niant le droit à des musulman(e)s de pouvoir vivre et se déplacer librement dans ce pays, comme ils le voudraient, et en accord avec les dites valeurs républicaines. Un refus affirmé qui ne fait que produire ce dit communautarisme à bien y regarder. Accusez, moquez, visez sans cesse une population donnée à travers de vaines polémiques aboutissant sur des lois, on ne peut s’attendre à d’autres résultats. Mais ces diplômés de l’ENA sont assez intelligents pour le savoir. Enfin, nous l’espérons pour eux.

 »Ils (les musulmans) attendent qu’un Islam de son temps, revendiquant pleinement les valeurs de la République, l’emporte. Et c’est en premier lieu aux musulmans de France de le construire, de mener ce combat culturel. Ils sont les premiers confrontés à la violence du message salafiste, radical. »

Un islam de son temps existe déjà, les musulmans ne se déplacent plus à dos de chameaux et disposent tous d’un compte bancaire et d’une connexion internet. Ils ne portent plus turbans et poignard à la ceinture, ils savent se délecter d’un orangina frais attablé autour d’un bon gratin dauphinois. Aucun d’entre eux ne cherche à effacer des frontons des tribunaux et écoles les notions de liberté, d’égalité et de fraternité. Ils vont tous à l’école et cherchent ensuite à se trouver un emploi afin d’assurer l’avenir de leurs enfants. Et pour ce qu’il est des salafistes, rassurez-vous, ils ne déambulent pas les rues, sabre à la main, nous menaçant de mort en cas de barbe trop courte ou jilbab pas assez long. Mais le mythe est séducteur, comme d’habitude. Mais êtes-vous seulement déjà allé dans un quartier à majorité musulmane sans vos gardes du corps pour y affronter l’objet de vos frayeurs..? Nous en doutons.

 »La laïcité, c’est la liberté de croire ou de ne pas croire. Mais c’est l’exigence, aussi, de ne jamais imposer ses croyances ou ses pratiques à l’autre. Cet équilibre, la France a su le construire. »

Ne pas imposer ses croyances ou pratiques à l’autre? N’est-ce pas ce que vous cherchez à faire à travers votre croisade laïque depuis deux ans? N’est-ce pas ce que tant d’intégristes laïques font au quotidien depuis que la parole raciste s’est libérée avec l’adoption de ces lois anti-voiles successives? Ce sont les musulmans que l’on somme à faire leurs, idéaux laïques, philosophiques et républicains et non le contraire. Ce sont les musulmans qui se voient contraints petit à petit d’abandonner toute pratique religieuse visible ou audible, à travers cette idée faussement laïque d’une religion qui ne saurait être tolérable que dans la sphère privée. Mais ce que vous oubliez surtout à préciser quant à ce que serait la laïcité (dans le texte) sont les deux choses suivantes : ce n’est pas l’unique droit de croire ou de ne pas croire que garantit la loi de 1905, mais la liberté dans l’exercice de son culte (en privé comme en public dixit la convention des droits de l’Homme), et surtout, de ne pas se voir enquiquinė par un Etat qui ne reconnaît aucun culte. Que l’on porte un pancho, un voile ou une robe ceintrée, vous, premier ministre n’avez non seulement pas votre mot à dire, mais vous avez le devoir de ne pas faire de distinction entre ces derniers. Compris?

Alors à moins d’aller jusqu’à refuser la portée légale d’une loi sur la laïcité que vous usez à tort et à travers, nous ne pouvons que vous conseillez d’en respecter les articles, tel que les musulmans le font déjà beaucoup mieux que vous. Dans le cas contraire, soyez plus clairs et décidés. Assumez votre voilophobie, votre refus de voir l’islam véritable prendre racine sur le sol français et battez-vous à restaurer un Etat théocratique nous dictant le comment vivre pour trouver grâce à vos yeux. Mais ne vous cachez pas derrière un prétendu féminisme, une tolérance universelle ou une volonté de voir la paix sociale revenir en territoire français. Nous ne sommes plus dupes. Assumez!

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