Et pendant ce temps, des gens manifestent contre le voile

Un an jour pour jour après la manifestation anti-voile qui eut lieu à Aubervilliers le 10 juillet 2015, quelques centaines de personnes ont jugé bon de recommencer la chose cette année. Ça s’est passé hier, à 16H, Place de la République à Paris.

L’autorisation avait été donnée par la mairie, nous n’allons donc pas discuter d’une quelconque illiceité d’un tel rassemblement qui n’aurait pas lieu d’être. Contons plutôt ce qui y a été dit et surtout cherchons à savoir qui se cache derrière ce rassemblement annuel.

Des femmes dans le vent

Soutenue par de nombreuses associations, l’idée a été lancée par le collectif Femmes sans voiles d’Aubervilliers, créé en 2013. Elles sont à l’origine au nombre de 3 : Josiane Doan (décédée depuis), Nadia Ould-Kaci et Nadia Benmissi. Leur problème : le voile. Et voici ce que ce voile représente pour ces dames :

 »Il est ni un simple tissu ni une finalité spirituelle en soi mais il symbolise le statut inégal de la femme. Le voile, sacralisé par les dérives de l’idéologie islamiste, est leur étendard de par le monde : uniforme mortifère, il humilie toutes les femmes et porte atteinte à nos valeurs républicaines…La liberté n’est ni occidentale ni orientale, elle est universelle.

Le voile ? Jamais ! Ni ici, ni là-bas, ni nulle part ailleurs !!! »

Voici ce que l’on peut lire sur la page facebook de ce dit collectif. Une page où ôdes aux femens et clichés de femmes voilées prises à leur insu, cotoient articles élogieux à l’égard de personnalités comme Elisabeth Badinter ou de l’ex chiite Chahdortt Djavann.

Elles ont ainsi décidé, pour vous, ce que devait être le voile. Il n’est pas une finalité spirituelle, il humilie les femmes et n’a sa place, ni ici, ni ailleurs.

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Les commentaires présents sur leur page facebook en disent aussi long sur l’état mental de nombre de nos compatriotes. La france c’est ceci, la liberté c’est cela, l’universalisme c’est nous, eux ne sont que des fous.

Tous les stéréotypes, toutes les idées reçues y sont présentes. Entre ceux persuadés que le voile est une invention du siècle dernier (merci Tareq Oubrou), les autres y voyant le symbole de l’islam guerrier à la sauce daesh, ou ceux s’offusquant de petites croisées en jilbab en allant à la mosquée avec leur maman, on en a de toutes les couleurs.

En voici un extrait :

 »Puisque aujourd’hui le voile représente clairement l’idéologie salafiste et donc daesh, puisque la plupart des autres musulmans ne portent pas le voile. Le voile devrait être banni et même interdit. Sinon alors autorisons les néonazi à se balader avec des croix gamées. »

Intéressant n’est ce pas?

Entre conformisme et voilophobie

Qu’elle ne ressentent pas le besoin de se couvrir comme celles qu’elles incriminent, soit, mais affirmer que les concernées ne le portent sans aucune dimension ou finalité spirituelle, c’est soit être victime de surdité aïgue, en refusant d’écouter les justifications des concernées, soit faire preuve d’une mauvaise foi incroyable. Ont-elles le même regard sur ces juives et chretiennes se couvrant de la même manière? Si la foi peut jouer dans un cas, pourquoi pas dans l’autre? Non, la musulmane voilée, c’est une provocatrice ou à l’inverse une soumise, incapable de ressentir un quelconque besoin de pudeur qui pourrait être en relation avec une hypothétique relation qu’elle entretiendrait avec le divin. Non non, la voilée musulmane est une sotte, que diable sa foi a t-elle à voir là dedans

Quant à la place que ce tissu pourrait avoir en ce monde, nous pouvons nous tromper mais, décréter qu’un vêtement n’a sa place ni ici, ni ailleurs, en France, on pourrait aisement appeller ça du totalitarisme. Imaginez à l’inverse qu’une horde de voilées hystériques clament au milieu de Baghdad que les cheveux au vent, ce n’est ni ici ni ailleurs, et c’est l’ensemble du monde civilisé qui se met en émoi.

 »Le fait que le port du voile ne soit exigé que pour les femmes est une discrimination en soi et met la femme dans un rapport inégal avec l’homme dans la société. Le port du voile réduit la personne des femmes à leur sexualité. »(1)

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Qu’un vêtement rende la femme le portant inférieure à l’homme mérite aussi développement. Dans ce cas, les touaregs hommes se couvrant le visage ont-ils le droit de s’estimer être en position d’infériorité quant à leurs femmes , visages découverts? Les hommes se devant de transpirer dans des pantalons serrés l’été au bureau ont-ils le droit de crier à l’inégalité face à leurs homologues féminins en tailleur et jupe courte? Et surtout, il faudra vraiment nous expliquer, comment le fait de porter le moins de vêtements possible rendrait une personne plus libre, plus raisonnable ou plus émancipée…

Vous avez raison il y a tant d’inégalités en matière de vêtement que ça en devient affligeant.

Quant au fait que le voile réduirait la femme à sa sexualité, il faudrait dans ce cas combattre le port de tout vêtement permettant une distinction entre les sexes, et là il y a du boulot. Pourquoi ne pas travailler sur une tenue universelle tant qu’on y est? Un haut, un bas qu’hommes et femmes porteraient afin d’être dans l’égalité la plus parfaite. Allons plus loin encore, cheveux courts pour tout le monde, interdiction des talons et sacs à main, vous savez, ces objets réduisant la personne le portant à son sexe. Et puis tiens, que le port des courses et des objets lourds soient aussi égalitairement répartis, que ces messieurs ne tiennent plus la porte à ces dames et que l’on puisse vous demander votre âge et votre poids sans que vous en tiriez un regard outré.

Vous avez encore raison, il y en assez de ces marques de différenciations partout! Ooooh la différence que c’est vilain! Surtout vilain à qui ne la supporte pas…

De la musulmane moderne, libérée et savante

Les deux Nadia, se défendent par contre bien d’une quelconque attitude phobique à l’égard de l’islam, car elles seraient, elles-même, musulmanes. Peut-être faudrait-il leur rappeler, surement ne le savent-elles pas, que l’islam ne se résume pas à porter un nom arabisant et manger du tajine en gandoura à la maison. Chacun fait ce qu’il veut, mais si l’on se sait et s’affirme musulmane, la moindre des choses s’est d’accepter qu’il y a tout de même quelques rudiments et fondamentaux à respecter. Que ces rudiments, us et obligations existent, quand bien même nous ne les pratiquerions pas. L’islam c’est pas ça, l’islam que je connais c’est ceci, leur islam n’a rien avoir avec, on connait la chanson. Que les takfiristes évangéliques apprennent leur religion ailleurs que dans Marianne et Riposte Laïque, et un grand pas sera déjà fait.

 »Mon père, le dimanche, lisait l’Humanité en buvant un verre de rouge. J’ai gardé sa carte de la CGT. J’ai gardé le mot « communisme » aussi. Pour l’idéal, pas pour ce qu’en ont fait les hommes. Depuis trois ans, le voile s’est répandu dans des proportions inquiétantes. Il tend à devenir la norme : dans notre ville, on le met même aux petites filles. Les Maghrébines qui ne le portent pas entendent des insultes du genre : « Tu fais honte à Dieu ! »(2)

Ah ces fameuses agressions verbales dont serait victimes les impies et mécréantes traversant les émirats islamiques que seraient devenus nos quartiers populaires! Quiconque a déjà pris la peine de traverser n’importe quel cité HLM de France pourra s’en rendre compte par lui-même. Entre les re-noies fringuées à la Béyoncé et les beurettes en legging déambulant les rues, le portable à fond sur du Kaaris, il faut vraiment se coller le dos à la mosquée ou aller le décolleté bien plongeant s’asseoir à la terasse d’un PMU rempli de blédards les yeux cernés par le shit, pour se voir apostrophé de cette manière. Surtout que ceux qui généralement se permettent de telles remarques sont bien ceux qui en ont le moins honte, de Dieu.

Dans une lettre adressée au CFCM en 2014, elles s’étaient aussi laissées aller à un exégèse du Coran des plus au point :

 »La lecture dite littéraliste de cette prescription coranique est en contradiction avec le fait que le Coran confère une égalité totale aux femmes et aux hommes. Nombre d’érudits en islamologie ont une lecture différente de cette « prescription » qui ne mentionne nullement la nécessité pour les femmes de se couvrir les cheveux. Cette lecture est en réalité une interprétation patriarcale du Coran. »(1)

Somptueux, une explication aussi scientifiquement poussée, Ibn Kathir en aurait été surement jaloux. Malheuresement pour elles, cette lecture patriarcale était aussi celle du Prophète de l’islam, paix et salut soient sur lui. Car à côté du Coran, il y a les hadiths, deuxième source de droit, dans l’islam, d’ailleurs systématiquement oubliée par celles et ceux voulant valider l’absence de telle ou telle chose en islam, car absente du Coran. Donc à moins de nier à cet homme son droit à pouvoir comprendre le Coran de la meilleure des manières, nous ne pouvons que leur conseiller de se taire sur ce dont elles n’ont aucune connaissance, et laisser parler celles et ceux qui savent.

La féministe maghrébine a souvent ça de surprenant qu’elle continue à faire mine d’adhérer à l’islam, qu’elle fustige pourtant à chacune de ses positions. Son islam serait le vrai, celui des autres serait le faux. Leur source, non pas le Coran, mais l’Algérie française, la Turquie sous Attaturk ou la Tunisie de Bourguiba. Cette époque où les arabes et les turcs connurent le nationalisme, la cigarette, le partisianisme politique, Hollywood, le whisky et la laïcité d’Etat.

Une laïcité qui pouvait vous faire enfermer pour vous être rendu à la mosquée un matin, où pour avoir appris l’arabe littéraire à vos enfants. Une époque portée par des femmes en mini jupe, couchant avant le mariage et dansant sur du Johnny. Une période de quelques dizaines d’année succédant à 13 siècles d’islam.

Mais pour cette féministe, cet avant n’existe pas, le vrai visage du Maghreb, de l’islam, c’est celui que l’on nous montre dans Le Figaro ou Le Monde à travers quelques clichés en noir et blanc. Le voile oscille ainsi dans l’esprit de ces dames entre invention moderne et pratique pré-islamique.

Mon choix oui, son choix non!

Aux femmes qui disent avoir choisi ce fameux voile, l’une d’elle répond encore :

 »On peut être femme et rétrograde – ce sont généralement les femmes qui perpétuent les inégalités sur les femmes. Pour elles, c’est une liberté, pour nous, c’est un consentement à un système. Mais qu’elles ne disent pas que c’est ça l’islam. Parce qu’elles sont une minorité.. Nous sommes contre car il n’existe pas dans l’islam. Aucun verset du coran ne dit « cacher la tête ». La pudeur doit être la même pour l’homme et la femme. »(2)

La musulmane voilée d’aujourd’hui est ainsi incapable de faire un choix raisonné, elle est donc soit soumise à ces messieurs les barbus, soit mentalement inapte à opérer à une quelconque critique de sa condition. Il faut donc au choix l’aider ou la combattre.

On a en tous cas pour le moment encore jamais vu de voilée venir leur baiser les pieds de remerciements, pour lui avoir permis d’ouvrir les yeux sur l’asservissement dont elle aurait été victime…

Ces femmes sans voiles sont de toute façon incapables d’entrenir le dialogue avec celles et ceux n’étant pas en accord avec elles. Et un jeune homme en a fait la triste constatation, ce 10 juillet 2016, au cours de cette fameuse manifestation.

De l’hystérie collective

Ce jeune homme, Ismael Boudjekada militant politique indépendant, a eu l’excellente idée de filmer et retranscrire en direct les échanges qu’il a eu avec certain(e)s manifestant(e)s. Et c’était du très beau, enfin jusqu’à ce que les policiers viennent lui expliquer de devoir gentiment aller voir ailleurs, le débat démocratique n’ayant pas sa place, Place de la République.

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On y entend des gens grogner leur haine du voile, l’une se cachant derrière ses origines algérienne, et l’autre se disant qu’il serait intéressant de savoir ce qu’elles (les voilées) en pensent. Ben voyons.

Courageux, et surtout bien mieux renseigné que ses interlocuteurs, il n’hésitera pas à leur rappeler ce que dit la loi en terme de liberté d’expression et de culte. Mais sourds et à court d’arguments, le dialogue tournera vite à l’hystérie.

Ils n’en ecouteront rien. Ces gens ont une vision du monde, de la vie, de la religion et de la femme qui leur est propre et qu’ils souhaitent à tout prix voir les autres y adhérer. Vous aurez beau leur mettre des femmes voilées en face, leur expliquant par a + b le pourquoi du comment de leur démarche, ils n’en feront rien, non pas parce qu’ils n’y croient pas mais parce qu’ils ne veulent pas y croire. Leur décision est prise, le voile, ou plutôt l’islam représentant ce voile, cette barbe, cet abandon total au Divin ne leur passe pas à travers la gorge.

D’un extrême à un autre

Ces femmes, aussi curieux que cela puisse paraître, ont en commun bien plus de choses qu’elles ne le pensent, avec les extrémistes qu’elles se sont chargées de combattre.

Ils partagent ensemble une vision extrêmement caricaturale de l’islam, faite d’interdits et de terreur ; mais surtout, une tolérance frisant le zéro quant à celles et ceux ne partageant pas leur vision du monde et de l’humain. Soit vous êtes avec nous, soit vous êtes contre. Tentons de les faire se rencontrer, surement auront-ils beaucoup de points d’accord!

Les policiers présents avaient proposé au jeune homme de faire une demande à la mairie pour pouvoir répondre dans les règles, en organisant une contre manifestation. Organiser une manifestation, en vue de défendre le port du voile, en 2016, à Paris…?

Ils ont décidément beaucoup d’humour nos gardiens de la paix !

Plus sérieusement, il est toujours aussi triste de voir des gens s’enfonçer dans la haine de l’autre aussi facilement, pour un vêtement, une religion, ou une compréhension de la religion que l’on ne partage pas avec son prochain…

Elles auraient pu se battre pour défendre ces milliers de femmes, qui chaque années dans ce pays, meurent sous les coups de conjoints violents, ou contre l’objetisation de la femme qui en est faites dans tous nos supports médiatiques et artistiques depuis si longtemps. Elles auraient pu se battre pour dénoncer les violences sociales, verbales ou physiques que vivent ces femmes voilées qu’elles jugent de si loin, mais non, elles ont décidés de se battre contre elles.

Qu’une ou deux leur ait un jour mal parlé, qu’ailleurs, certaines souffrent des excès de certains, au nom de l’islam ou autre chose… Est-ce vraiment une raison valable pour pouvoir s’en prendre à celles ici, ne profitant que de leur droits et libertés? Quand bien même l’usage qu’elles en font ne leur déplaise.

Il n’y a pas qu’un seul modèle féminin sur cette Terre, et le leur ne fait véritablement pas l’hunanimité. Ainsi, il serait peut-être judicieux pour ces dames de prendre le recul nécéssaire quant à leurs prises de positions, très loin d’un quelconque universalisme, de comprendre que l’on peux penser et vouloir vivre différemment. Il y a des problèmes bien plus important, commun à tous et n’attendent que d’être traités, que ce vêtement portée par cette dame croisée au détour d’une ruelle…

(1)http://www.ldif.asso.fr/pdf/laicite/LettreOuverteCFCM25112014.pdf

(2)https://la-voie-de-la-raison.blogspot.fr/2015/07/femmes-sans-voile.html

 

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