La France est-elle encore terre chretienne?

 

 

 

Alors que la France s’enfonce dans un laïcisme des plus virulents, traquant la moindre visibilité religieuse. Tandis que le nombre d’athées revendiqués se fait croissant et que les églises ferment, faute de paroissiens et de prêtres, certains l’affirment sans aplomb : la France est un pays chrétien!

Une affirmation qui ferait glousser de rire n’importe quel pape pré-Vatican II, tant les français ne semble n’avoir d’attachement au christianisme que lorsqu’il s’agit de déballer les cadeaux à Noël ou d’enterrer ses morts… La France, ancienne fille ainée de l’Eglise, peut-elle se targuer d’une quelconque crédibilité en se revendiquant encore du christianisme?

Oui, la France est bien un pays chrétien

Pour bien commencer, sachons déjà que la France devient France le jour où Clovis, premier roi franc, se baptise. Les tribus présentes dans l’ancienne Gaule sont alors tenues d’adopter le catholicisme comme son roi. Clovis est ainsi le premier roi d’Occident reconnu converti au christianisme. Ses successeurs seront communément appelés fils ainés de l’Eglise, à tel point que l’appellation désignera sans équivoque l’unique roi de France. Ce sont ces mêmes rois qui créeront les Etats Pontificaux par la suite.

Quelques siècles plus tard, ce sont de France que démarreront la plupart des croisades, prêchées par d’ardents religieux bien du terroir. Au Moyen Orient, malgré l’arrivée progressive de portugais, lituaniens et italiens, la French Touch des croisades sera telle que le commun des croisés sera d’office qualifié de Franc par les musulmans. L’autre grande croisade connue sera celle menée contre les Cathares, partant encore de France, et cette fois-ci menée sur le sol français même.

L’inquisition aussi, fut création française. Avant de migrer en Espagne pour épurer le territoire de ses juifs et musulmans, elle fut longtemps affaire française, instituer dans le but d’éradiquer la secte cathare et lutter contre les Vaudois. Même les templiers finiront par y passer.

C’est aussi en France que le réformisme protestant rencontrera sa plus grande opposition, que naitra le gallicanisme, doctrine promouvant une certain dichotomie entre l’Etat et la papauté, réduisant la dimension temporelle de la religion, et où se trouvent encore parmi les plus grands lieux de pèlerinage chrétiens. Un simple tour de France et de ses villages permettent de s’apercevoir de l’omniprésence du catholicisme ses milles dernières années. Eglises, cathédrales et grosses croix du Christ à l’entrée de certaines communes ne nous y trompent pas.

Alors oui, la France a été l’une des nations où le christianisme fut le plus productif et ancré. Ces valeurs actuelles, bien que désacralisées au possible  sont toutes issues de la pensée chrétienne et de ces 15 siècles de présence. La démocratie, la laïcité, la liberté, sont des éléments qui n’ont pu naître et s’épanouir que grâce ou à cause de son héritage chrétien. Nombreux sont ceux des historiens et intellectuels qui ne s’en cachent plus.

 »En réalité, les héritages de notre passé judéo-chrétien sont partout présents et même les plus anticléricaux ne semblent pas réaliser que nombre de principes auxquels ils tiennent par-dessus tout proviennent du christianisme. » (1).

 »La pensée laïque n’est pas une pensée déchristianisante mais chrétienne immanente…Dieu quitte le ciel pour descendre sur Terre. Jesus reste le héros. On lui demande seulement de ranger son auréole, d’éviter tout signe ostentatoire. On parle, pense, vit, agit, rêve, imagine, mange.. on conçoit en judéo-chrétien, construit par deux milles ans de formatage du monothéisme biblique. »(2).

 

La France est aussi tout son contraire

Depuis 1789, la France est rentrée dans une nouvelle ère. Dieu n’a plus son mot à dire, la raison l’a emporté et les hommes sont libres. Libérés du carcan religieux et libres d’entrer de plein pied dans l’économie de marché capitaliste. Amorcée par les Lumières, une vague anti-cléricale souffle sur la France, se mutant tantôt et souvent en un anti-déisme sans gène. Les papes successifs voient la nouvelle République s’éloigner durablement, allant jusqu’à leur nier tout pouvoir. Une sécularisation progressive qui aboutira à cette fameuse loi votée en 1905. 

En parallèle, s’en suit l’éviction des religieux de l’enseignement et de toutes les sphères d’influence. Le culte du matériel et de l’individualisme remplace peu à peu celui de Marie et de son fils. Les églises se vident et certaines vont jusqu’à fermer. La France devient laïque. Là où la laïcité n’était qu’un principe juridique distinguant les églises de l’Etat et accordant une liberté religieuse à tous, elle fait place à une véritable morale dictant au croyant sa conduite. Une nouvelle chasse aux sorcières démarre et les derniers catholiques pratiquants sont dépeints comme d’austères fanatiques hostiles au progrès.

Les croix sont peu à peu partout retirées de tous les murs et la parole du croyant dans le débat public perd toute légitimité. On ne lui demande plus son avis et on s’en moque d’ailleurs ouvertement. La France s’isole du reste du monde et se fait régulièrement remarquée par ses homologues européens par son envie pressante de couper toutes les racines qui pourraient encore la lier à son passé chrétien.

 »Il n’y a pas si longtemps, la classe politique française, de gauche comme de droite, se retrouvait unie pour nier la reconnaissance des racines chrétiennes de la France, ou de l’Europe : on se souvient comment Jacques Chirac et Lionel Jospin, en 2000, s’étaient accordés pour rayer la mention d’héritage religieux du projet de charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. À l’époque, seule une petite minorité de chrétiens osait s’en offusquer, tant il semblait alors quasi obscène d’invoquer publiquement le christianisme dans notre République laïque. »(3)

En ouvrant une Bible, on peut effectivement de demander ce que la France et les français ont encore bien en commun avec ce Prophète déifié qu’est Jésus et la religion à laquelle il appelait. La charité dite chrétienne n’est plus qu’un mirage, plus personne ne prie ou jeûne. La foi n’est plus que quelque chose de privé, si privé qu’elle n’a plus aucune influence sur le commun des citoyens. Quant à l’amour de son prochain, Roms et réfugiés vous en parlerais bien…

La France ne sait surtout plus ce qu’elle est

A bien regarder les débats de ces douze dernières années, on peux très vite s’apercevoir que la réaffirmation d’un héritage chrétien chez certains, va exactement de paire avec l’emballement médiatique se faisant autour de la place de l’islam en France. En somme, il paraît difficile de voir en l’affirmation de certains à une France d’origine chrétienne autre chose qu’une volonté de faire front à cet islam prenant de plus en plus de place dans l’espace public. La France laïque et déspiritualisée ne proposant d’identité solide, la morale et l’identité laïque n’étant absolument pas porteur d’une symbolique et d’une histoire forte, réaffirmer son héritage chrétien permet dans la bouche de certains de se retrouver une identité jusqu’ici trop floue et sans consistance.

C’est ainsi que ses dernières années, ô combien de débats nationaux se firent autour de l’identité française. Une identité en péril, attaquée de toute part et s’émiettant face aux pressions d’un communautarisme musulman de plus en plus visible. Des responsables politiques jusqu’ici muets sur leur croyances religieuses, redeviennent subitement chrétiens, croulant d’éloges pour une religion dont ils n’avaient que mépris jusqu’aujourd’hui. La France est donc dans une situation très paradoxale : se définissant comme laïque et donc neutre, mais désireuse de réaffirmer une certaine tradition chrétienne. Une France reniant le religieux mais s’en réappropriant tantôt quelques éléments pour mieux s’opposer à ré-islamisation de sa minorité musulmane.

Finalement, peut-on voir en ses déclarations réactionnaires ici et là un retour au religieux de certains souchiens descendants de catholiques? Il y a de quoi fortement en douter. L’attitude de certains protagonistes politiques redevenant soudainement christianophiles deux ou trois fois dans l’année, ne semble n’être qu’une énième façon de s’édifier face aux musulmans. A ces musulmans n’ayant pas mordus à l’ameçon républicain et son lot de valeurs fantoches, se réappropriant une identité solide et parfois militante, que de plus en plus de français laïcisés cherchent à retrouver dans des identités refuges et muables, faute de mieux.

Cette attitude n’est qu’une preuve à charge supplémentaire du manque de consistance et de profondeur de ce modèle républicain qu’ils essayent de vendre aux français. Le christianisme était autrefois cet ensemble de valeurs et de pratiques reliant les gens entre eux, leur permettant d’avancer ensemble et faire front face aux épreuves, se réunissant autour de principes commun. Il était un ciment pour la France. La république à chercher à substituer ces valeurs doublement millénaires par de nouvelles, sois disant universalistes, sans saveurs et trop floues, et les gens ne s’y retrouvent plus.

La France est-elle terre chrétienne? Elle l’a été, et ne l’est aujourd’hui que quand elle se sent en danger. Mais la foi n’y est plus. La France est surtout une nation qui se cherche et ne se trouve pas. Elle à voulu changer, à changé mais refuse de la faire aujourd’hui. Elle cherche à se façonner une image immuable et universaliste, fixe et figée, en dépit des changements démographiques, culturels et religieux qui la touchent de l’extérieur comme de l’intérieur. Si seulement elle savait que les musulmans sont une chance pour elle, si seulement elle osait leur accorder une oreille attentive. Mais elle préfère faire la sourde oreille et attaquer ce qui lui semble étranger.

La laïcité philosophique dominant actuellement le pays ne pourra subsister longtemps. La neutralité attendue des citoyens est une chimère, l’être humain a besoin d’une identité pour pouvoir s’identifier à d’autres. Aujourd’hui, certains tentent de se retrouver dans le christianisme de leurs pères, quand d’autres se retrouvent ailleurs. Mais le christianisme a été tué il y a longtemps de cela et la France en a été surement l’un de ses principaux assassins.

(1)://www.atlantico.fr/decryptage/cet-heritage-judeo-chretien-bien-assimile-que-france-finit-oublier-voire-nier-michel-maffesoli-christophe-geffroy-1047728.html#JWHcFLyVhdSmT4Wi.99

(2)Aissam Ait Yahia, De l’idéologie islamique française.

(3)http://www.lavie.fr/debats/chretiensendebats/racines-chretiennes-de-la-france-eternel-retour-ou-retournement-15-10-2015-67393_431.php

 

 

 

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