Il y a quelques mois, le monde entier, enfin surtout la France, se montrait consterné par l’exécution d’un leader de l’opposition chiite en Arabie Saoudite.
Ils étaient 47 à mourir ce jour là, il en était le seul chiite. Il était aussi le seul dont on parla. Les autres n’étaient que des sunnites, et pour la plupart accusés de terrorisme ou de liens avérés avec Daesh ou al Qaïda. Quelques semaines plus tard, dans l’Iran voisin ce sont 6 prisonniers sunnites qui seront pendus haut et court, pour inimitié à l’égard de Dieu (moharebeh). 27 autres attendent encore en prison, dans le couloir de la mort, que la corde se place autour de leur cou. Vous ne le saviez pas? Bien évidemment, ce n’était encore une fois que des sunnites.
Quelques euros pour se bander les yeux
Avec la normalisation des relations diplomatiques et surtout avec les millions d’euros que la France va pouvoir retirer de ses partenariats économiques avec l’Iran, il est compréhensif que le gouvernement Hollande puisse arriver à plus facilement à tourner le regard à chaque corde passer au cou d’un sunnite en Iran. L’an dernier encore, le nombre d’exécutions, tous crimes confondus, nous était régulièrement mis sous le nez dans l’ensemble de nos quotidiens. Il fallait diaboliser ce pays à tout prix. Depuis, silence (quasi) complet. En dehors de quelques médias indépendants et des quelques associations soucieuses des droits humains, le sort de ces gens ne semblent attrister que peu de monde.
Sur une population de 80 millions d’habitants, les sunnites compteraient pour 10%, concentrés dans certaines régions où ils se trouvent être majoritaires. Si le pays compte à peu près 10 000 mosquées sunnites sur un total de près de 50 000 mosquées chiites, toujours aucun lieu de culte décent pour les sunnites ne trouve place dans la capitale, Téhéran.
Si les chrétiens bénéficient de leurs églises, que les juifs, au nombre de 8 500, soit l’une des communautés juives les plus importantes en dehors de la Palestine occupée, peuvent disposer de leurs synagogues, les sunnites ne peuvent pas en dire autant. Les quelques salles de prière que compte la ville sont régulièrement détruites, à chaque foi que l’une d’elles se voit découverte par les autorités. Selon Saeed Tehran, il y aurait une volonté claire de pousser à bout les sunnites afin qu’ils réagissent.(1)
La constitution iranienne prévoit pourtant la possibilité à toute communauté religieuse de disposer de ses propres lieux de culte, même les zoroastriens y ont droit. Mais rien n’y fait. Mieux encore, l’Etat favorise la construction d’édifices religieux réservés au culte chiite dans des villes et villages pourtant majoritairement sunnite.
Depuis 1979, aucun candidat sunnite ne peut se présenter à l’élection présidentielle et aucun d’entre eux n’a été membre du gouvernement. Contrastant ainsi avec l’Etat Saoudien voisin, qui a su accueillir en ses plus hauts degrés des membres de la communauté chiite depuis peu.
Des conditions de vie précaires
Dans une lettre écrite par des prisonniers sunnites, ces derniers décrivent les conditions de vie dans lesquelles beaucoup d’entre eux vivent :
Les sunnites qui habitent surtout dans des régions périphériques du pays vivent dans des conditions très difficiles et leur vie n’a aucune valeur. Non seulement les militants politiques et religieux sont arrêtés, emprisonnés, torturés et condamnés à mort, mais aussi les pauvres gens qui essayent de faire de petits boulots pour gagner leur pain sont abattus par des gardes-frontières. (2)
L’arrestation et l’exécution du poète Hashem Shaabani, s’étant laissé aller à faire étalage de son hostilité envers l’État, avait permis à la sociologue belge d’origine iranienne Firouzeh Nahavandi de souligner un détail des plus importants :
« Il est originaire de la province du Khuzestan, une région majoritairement arabophone, sunnite, et très riche en pétrole. Et il y a une sensibilité particulière face aux suspicions d’indépendantisme dans des régions comme celles-ci« . (3)
Effectivement, de nombreux groupes à tendance indépendantiste, essentiellement kurdes, sont présents dans la région. La perte de cette région serait la perte d’une énorme manne financière. De quoi susciter d’autant plus l’animosité d’un état déjà largement controlé par un clergé de plus en plus hostile au sunnisme. De nombreux leaders religieux ont ainsi été assassinés par des groupes paramilitaires, tel le Basij, créé à l’origine par l’ayatolLah Khomeinei en 1979, ce qui selon les observateurs locaux mettrait directement en cause le gouvernement.
Un Iran fréquentable?
Ne soyons pas trompés par l’apparence douce et joviale du nouveau président Hassan Rohani. Ce n’est que sa marche arrière quant au nucléaire, sa normalisation avec Israël et la relative distance qu’il prend avec son clergé qui le rend plus sage et modéré aux yeux du monde civilisé.
Cet Iran fréquentable (dixit LeMonde) reste une prison à ciel ouvert pour une partie de sa population. Ils sont chaque année plusieurs dizaines à finir se balançant une corde autour du cou. Et au vue du revirement de situation actuelle, du rapprochement américano-européen que connait l’Iran, au détriment de l’Arabie et des sunnites voisins, leur mort ne pourra que venir alourdir le bilan de celles et ceux quittant ce monde dans l’obscurité la plus complète.
sarrazins 
C’est bien… surtout que tu mets l’accent sur le fait que même les juifs ont une sinagogue en Iran (tu m’informes et je ne le savais pas) maintenant, vu que tu victimises et demandes équité, moi je te pose une question simple sur la magnifique Arabie Saoudite wahhabite et sunnite: Combien d’églises et synagogues il y a t’il sur le territoire saoudien? je t’aide: ZERO… Il faut faire preuve d’objectivité et de responsabilité intellectuelle avant de se targuer d’une opinion objective et juste.
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