Faut-il faire taire Jamel Debbouze?

Représentant phare de cette France black blanc beur imaginaire, il est l’arabe préféré de ces dames, un exemple souvent cité prouvant la possible réussite pour chacun des jeunes de nos belles banlieues.

Si nous lui savions un certain talent (tout est relatif) pour l’humour et la comédie, Jamel semble d’années en années plus enclin à se prononcer sur un sujet sur lequel il s’était pourtant fait très silencieux en ses premières années de carrière : la religion.

Et vous, en tant que musulman, vous en pensez quoi?

A l’instar des rappeurs et sportifs de confession musulmane français, il est vrai que la démarche est souvent désirée par les journalistes d’en face. Cherchant le scoop, la phrase qu’il ne fallait pas dire, les médias sont très friands de polémiques. Questionner une personnalité publique, musulmane, sur sa foi, c’est l’amener à prendre position. Avec nous ou avec eux, du côté des français ou de ces musulmans si gênants (pratiquants et visibles)?

Dès le sujet abordé, on sent généralement la gêne prendre possession des yeux de l’interrogé. La religion, en France, c’est tabou, dépassé, et ça se pratique à l’abri des regards. En parler devant des millions de téléspectateurs, revient au choix, à booster, ou à plomber sa carrière.

A booster si portant le masque du gentil descendant d’immigré, louant une France toute de chances et de liberté, et accordant à sa religion une place toute limitée. Ou à l’inverse, se tirer une balle dans le pied en prenant des positions n’allant pas dans le sens du vent. S’ériger contre la perpétuelle croisade anti-voile, émettre des réserves quant à la moralisation laïque effective, ou simplement déclarer faire sa prière ou jeûner le mois de Ramadhan n’est pas très vendeur. Ne parlons même pas de faire preuve d’une quelconque réserve quant à la politique de l’extrême droite israélienne.

Pour cause, la majorité de celles et ceux composant le public de tous ces individus, quand ils ne sont pas musulmans faiblement pratiquant, ne le sont pas du tout. Et dans un pays où l’anticléricalisme est un véritable courant de pensée, une tradition bientôt tri-centenaire, il vaut mieux rire de la religion que d’en parler sérieusement, et encore moins de s’en faire un quelconque défenseur.

Donc moi en tant que musulman, j’en pense ce que vous aimeriez que j’en pense.

Jamel et l’islam à la carte

Pour en revenir au cas Jamel, il est inutile de citer ses propos qui sont largement trouvable sur le net ici et là. La plupart du temps sous couvert d’humour, il s’est régulièrement permis des remarques des plus déplacées. Des remarques qui lui auront même valus une fatwa le sortant carrément de l’islam, par un savant questionné à son sujet récemment. Au delà des ses propres penchants pour des actes que l’islam réprouve dont il se permet tantôt de faire étalage, qui ne regarde que lui, ce sont ses interprétations très personnelles de l’islam qui posent véritablement problème.

L’islam n’est pas ceci, l’islam c’est plutôt cela. Comme tant d’autres, il n’a fait, maladroitement ou par pur opportunisme, que tendre le bâton déjà durcit par le nombre de coup jusqu’ici donnés aux musulmans hexagonaux. Dans une interview donnée à France 5, il estimait le retour à la religion musulmane de beaucoup d’entre ces coreligionnaires comme étant plus un réflexe, une espèce de protection, plus que l’amour de Dieu.(1). Dans le journal La Vie il contait ce passé si souvent idéalisé où la religion n’existait que pendant le Ramadhan et à quelques moment bien précis dans l’année :  »Quand j’étais môme, notre religion c’était le football : on jouait cinq fois par jour en direction de La Mecque! » en rajoutant que la religion ça sert surtout  »à ne pas avoir de peur de l’après, et c’est rassurant! »(2).

Il dispense ainsi à un auditoire désireux de cautionnaires musulmans ce qu’on attends de lui, ce qu’on espère du bon musulman, intégré, car comme nous ou presque. Il est distant quant à l’islam, critique de ces musulmans trop musulmans pour être de bons français, et sait en rire. Rire du religieux étant ce qui se fait de mieux en terme de liberté d’expression, la petite blague ou réflexion potache à ce sujet est accueillie à bras ouvert. C’est un aller simple vers la réussite et la gloire et beaucoup d’autres l’ont compris. De Sophia Aram, se moquant allègrement du voile à Ramzy traitant de prostituées les femmes du paradis, les exemples se bousculent et se ressemblent.

Sophia-Aram

Critiquer l’islam et les musulmans fait perdre quelques fans mais en fait gagner tellement d’autres, donc les risques sont bien moindres par rapport aux gains possibles. Si l’on ajoute à cela sa visite au Mur des lamentations, kippa sur la tête, son manque d’engagement et ses photos tout sourire avec nos présidents successifs, il y a de quoi en décevoir plus d’un.

Nous ne pouvons que conseiller à Jamel et à ses amis de continuer à faire ce qu’ils savent faire si c’est leur choix, mais de surtout, surtout, laisser l’islam et les musulmans à l’écart et à l’abri de leurs prises de positions publiques. Et si vous, lecteurs, passez par Marrakech, allez y plutôt pour y rencontrer les gens du quotidien, y observer la richesse de son patrimoine, plutôt que pour chercher à y rire. Sauf si entre deux moqueries sur les arabes et l’islam, vous souhaitez profitez d’un sketch sur le papier toilette et les poils pubiens de Franck Dubosc.

Au lieu de chercher à le faire taire, lui ou ses semblables, cherchons ainsi plutôt à tourner nos oreilles vers d’autres Hommes, plus bénéfiques à tout à chacun, et souhaitons lui, comme aux autres, guidée et sagesse. Peut-être reviendra t-il

http://www.questionhalal.com/teum-teum-debbouze-confirme-sa-distance-avec-lislam/2011/07/23

http://www.lavie.fr/actualite/portraits/jamel-debbouze-je-ne-connais-pas-l-islam-dont-parlent-les-journaux-10-04-2012-26308_63.php

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